Anne-Cécile Moser
Comédienne, metteure en scène, conceptrice, dramathérapeute
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Chroniques Adriatiques
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Metteure en scène Cie

Description

En hommage à Marco Facchino qui nous a quitté durant les répétitions. Il restera à jamais dans nos mémoires d’artisans de l’ombre. Gracias para todo y hasta siempre amigo.

Alice : “C’est simple: d’abord faire un petit tas de sable, une montagne, ensuite on plante le bâtonnet droit au sommet de la petite montagne.
Et là à tour de rôle, avec la main, on retire une petite quantité de sable. A tour de rôle.
Attention! Celui qui fait tomber le bâtonnet a perdu, il a un gage! UN GAGE…Villafranca c’est ça. Toi, tu es le petit bâtonnet. Planté dans du sable.
C’est pas confortable, c’est pas stable mais c’est déjà ça. Tu te dis que tout ça c’est à toi. Et des gens, pour rire, te retirent peu à peu ton sable jusqu’à ce que tu tombes…”

Un spectacle constitué de trois volets qu’il convient d’ouvrir un à un sur l’Italie contemporaine.
Dans le premier, Ciao, papà ! une femme partage, le temps d’un étrange voyage, le même compartiment de train qu’un comédien qui a autrefois interprété son père.
Dans le deuxième, Ave Maria, une jeune femme à la veille de ses noces est assassinée par erreur, chacun des protagonistes du drame témoigne.
Enfin, Lido Adriatico, qui suit les retrouvailles de deux frères que tout sépare, mêle les deux procédés, plaçant le spectateur définitivement au cœur de l’action, sur le fil d’une « chronique d’un mort annoncée ».

Entre fiction et témoignage, poésie et enquête, ce triptyque débusque l’inconscient collectif d’une Italie confrontée à ses faillites morales et sociales.
L’écriture précise de Domenico Carli restitue les facettes tragi-comiques de femmes et d’hommes aux prises avec une société qui entretient des liens incestueux avec le système Mafia.
« Cadrant » son sujet à la manière d’une cinéaste, Anne-Cécile Moser convie les spectateurs à une immersion qui a également valeur de parcours initiatique.


Le texte est publié aux Editions d’en Bas, Lausanne
Co-production :
Théâtre du Moulin-Neuf-Aigle, Théâtre de l’Echandole-Yverdon, Théâtre de l’Oriental-Vevey, Théâtre du Grütli-Genève, Equilibre-Nuithonie-Fribourg
Avec le soutien:
Affaires culturelles du Canton de Vaud, Loterie Romande, SIS-Fondation pour les artistes interprètes, Fondation Ernst Göhner, Corodis, Migros Vaud

L'affiche

affiche 1

Dates

Théâtre de l’Echandole-Yverdon
Chroniques Adriatiques (1er, 2ème et 3ème volet)
Le mardi 30 septembre, 1er et 2 octobre 2014

Théâtre de l’Oriental-Vevey
Chroniques Adriatiques (1er, 2ème et 3ème volet)
Mercredi 12 novembre  2014 Ciao, papà!
Jeudi 13 novembre 2014 Ave Maria
Vendredi 14 novembre  2014 Lido Adriatico
Samedi 15 novembre 2014 Chroniques Adriatiques
Dimanche 16 novembre 2014 Chroniques Adriatiques

Théâtre du Grütli-Genève
Chroniques Adriatiques (1er, 2ème et 3ème volet)
Du 2 au 14 décembre 2014
Les mardi, jeudi et samedi 2014
Les mercredi et vendredi 2014

Théâtre du Moulin-Neuf-Aigle Chroniques Adriatiques
Chroniques Adriatiques (1er, 2ème et 3ème volet)
Le vendredi 19 décembre 2014
Le samedi 20 décembre 2014
Le dimanche 21 décembre 2014

SAT-Porrentruy Salle de tribunal de Porrentruy
Ave Maria (2ème volet)
Le vendredi 6 février 2015

Théâtre Equilibre-Nuithonie-Fribourg
Chroniques Adriatiques / Ave Maria et Lido Adriatico (2ème et 3ème volet)
Le jeudi 5 mars 2015
Le vendredi 6 mars 2015
Le samedi 7 mars 2015
Le dimanche 8 mars 2015

Teatro Sociale-Bellizona
Ciao, Papà! (1er volet)
Le mercredi 12 mars 2015

Evénements

Au théâtre du Grütli-Genève
Débat « Crime organisé, tous concernés ? »
Avec Domenico Carli (auteur et metteur en scène), Florian Cova (Centre interfacultataire en sciences affectives), Nicolas Giannakopoulos (président de l’Observatoire du crime organisé).
Animé par Cécile de la Torre.
Jeudi 27 novembre 2014

Expo « Instants Adriatiques »
Photographie d’Oronzo Marmone et Guy Tornay

Au Théâtre de l’Oriental-Vevey
Concert avec les Officina Zoé, musique populaire du Salento
Vendredi 14 novembre 2014 à 22h

Expo ” Instants Adriatiques”
Photographie d’Oronzo Marmone et Guy Tornay

SAT-Porrentruy Salle de tribunal de Porrentruy
Scolaires et débats
mercredi 4 et jeudi 5 février 2015

Distribution

De
Domenico Carli

Avec
Yves Adam, Maureen Chiché-Mayoraz, Roberto Molo, Shin Iglesias, Michel Rossy, Isabelle Tosic, Anne-Marie Yerly

Ciao, Papà!
Shin Iglesias et Roberto Molo

Ave Maria
Maureen Chiché-Mayoraz, Michel Rossy, Isabelle Tosic,
Anne-Marie Yerly

Lido Adriatico
Yves Adam, Maureen Chiché-Mayoraz, Roberto Molo, Shin Iglesias, Michel Rossy, Isabelle Tosic, Anne-Marie Yerly

Conception et mise en scène
Anne-Cécile Moser
Scénographie pour Ciao, Papà !
Elissa Bier
Création sonore
Stéphane Vecchione
En collaboration pour Lido Adriatico
David Tabachnik
Lumière
Jean-Marie Bosshard
Vidéo pour Ciao, Papà!
Brian Tornay
Costumes
Claude Rueger
Maquillage pour Ciao, papà!
Malika Stähli
Régisseur générale et régie son
David Tabachnik
Accessoires et régie plateau
Emilie Triolo
Régie son/lumières
Reuben Bramley
Construction pour Ciao, Papà !
Hervé Jabveneau, Adrien Moretti, Nicolas Frediani
Administration
Emmanuel Colliard

Presse

  • LE COURRIER - 10.12.14

    Au nom du père, du fils et du saint-crime

    THEATRE
    Au Grütli, Anne-Cécile Moser monte les “Chroniques Adriatiques” de Domenico Carli, qui auscultent les liens familiaux dans une Italie gangrénée par la mafia. Splendide.

    L’an passé, le Grutli programmait la version intégrale des Brigands de Schiller créés par Eric Devanthéry. Un pari audacieux relevé avec brio et un hommage contemporain au poète allemand revisité avec ferveur par le metteur en scène genevois. Cette semaine encore, il ne faut pas manquer une autre intégrale – les occasions sont rares -, qui fait halte à Genève dans le cadre d’une belle tournée. Cette fois-ci, il s’agit de trois oeuvres théâtrales, et indépendantes, d’un auteur bien vivant, à voir au cours d’une même soirée. Si Schiller était notre contemporain, ses jeunes idéalistes n’hésitant pas à tuer auraient-ils les traits ambivalents des mafieux dépeints par Domenico Carli dans ses Chroniques Adriatiques (voire notre édition du samedi 22 novembre)?

    Ciao, Papa!, Ave Maria et Lido Adriatico forment les volets de sa trilogie récemment parue aux Editions d’En Bas, fresque d’une Italie du Sud gangrénée par le crime organisé. Pas plus que chez Schiller, les personnages fictionnels du Lausannois natif des Pouilles n’empruntent au manichéisme. Et c’est cela qui les rend attachants. Le système mafieux, comme une fatalité, est la seule issue possible à leur misère sociale ou affective, alors qu’ils sont guidés par la vengeance ou la survie.

    Par l’intelligence de sa mise en scène, Anne-Cécile Moser nous balade à chaque volet dans un espace différent du théâtre, des gradins jusqu’au cercle du public formé sur le plateau autour des comédiens, pour rendre le crime de plus en plus palpable. Et donner corps à trois textes tissés autour du lien familial, fortement ancrés dans la fiction mais flirtant de plus en plus avec l’âpre réalité. On démarre par le plus romanesque et le plus cinématographique des trois: Ciao,
    Papa! ou la rencontre dans un train entre une jeune femme (magnifique Shin lglesias) et l’acteur qui incarnait son père à l’écran, homme politique assassiné par la mafia (charismatique Roberto Molo). La très belle scénographie d’Elissa Bier y donne toute sa place à la psychologie de l’enfance, volée à Laura au profit de l’engagement paternel.

    Dans Ave Maria, c’est une mère (Anne-Marie Yerli) qui pleure sa fille (Isabelle Tosic), assassinée par erreur à la place de Suzy (excellente Maureen Chiché-Mayoraz) par un patron de la mafia loupant sa cible concurrente (convainquant Michel Rossy). Un deuxième volet brillamment construit autour d’une suite de monologues adressés, dont la metteure en scène fait entendre la polyphonie des voix.

    Enfin, Lido Adriatico convoque le retour d’Allemagne du frère, Dario, l’universitaire, dans ce village déserté de Villafranca, toile de fond des trois pièces. L’ensemble de la distribution, rejointe ici par Yves Adam, campe une jeunesse minée par le chômage, autour de la mère de Dario et de son frère Vito. En cercle autour des comédiens, on assiste à ce dernier voyage adriatique, crû et poétique à la fois, qui s’impose comme un requiem en clair-obscur. Au milieu des personnages vêtus de blanc, rêvant de fuite et de littérature, Angelo est cet ange providentiel, mais maudit, par qui s’opère le basculement inéluctable dans la mafia. Dans la lente agonie des corps sur un sol de terre noire, la mort fera taire l’espérance. Loin de la tragédie, et du réalisme, Anne-Cécile Moser rend ici un magnifique hommage à l’écriture, jamais noire, de Domenico Carli.

    Cécile Dalla Torre

  • Gauchehebdo 19.12.14

    “Chroniques Adriaticques” ou le théâtre face à la mafia

    THEATRE
    “Chroniques Adriatiques” est un tryptique autour des dommages directs et collatéraux, humains et sociaux, du crime organisé en Italie.

    Mis en scène à bras-le-corps avec le réel, le jeu d’une intense physicalité et la matière, par l’énergique et inventive lausannoise Anne-Cécile Moser, le spectacle Chroniques Adriatiques recueille trois pièces de Domenico Carli, Ciao, Papa!, Ave Maria et Lido Adriatico. Elles renouent avec la dimension enquête journalistique et de roman noir chère à des plumes italiennes célèbres. Que l’on songe au magistrat romain Giancarlo De Cataldo pour Romanzo criminale, histoire d’une bande de brigands du Sud italien décidés à conquérir le marché de la drogue romain dans les années 70. Ou à l’icône anti-mafia, Roberto Saviano, menacé de mort et sous escorte policière dès 25 ans et à vie après la publication de Gomorra: Dans l’Empire de la Camorra, qui narre les rouages de la mafia napolitaine. Saviano aime à citer Truman Capote: “Mon rêve, c’est que le fleuve de la réalité et celui de la fiction finissent par se rejoindre.”

    Jouant avec les genres, sans que l’on sache toujours discerner le vrai de l’invention littéraire ou de la «licence poétique», ces auteurs confirment que le développement de la mafia s’appuie sur un retrait de l’Etat et sur l’ouverture commerciale des sociétés, où la mondialisation est une aubaine.
    Aux yeux de la metteure en scène, “chacun peut être confronté à cette criminalité organisée qui concerne le fonctionnement même d’un système ultralibéral. La petite histoire d’anonymes est traversée par la grande Histoire de ce drame. Ainsi au fil d’Ave Maria, la vive et autonome Suzy dirige son entreprise mafieuse comme une PME. Relativement à Don Tonino, parrain patriarcal, clanique et rétrograde, elle amorce une transformation que le fils Tonino scellera en installant une criminalité systémique, globalisée. Celle-ci est profondément liée à une classe politique compromise comme en Ukraine aujourd’hui, où le gouvernement et le secteur bancaire peuvent être vus comme intégrés à un réseau structurel mafieux.”

    Des récits familiaux
    Centrées sur les liens entre situations familiales et dimensions sociales, économiques et anthropologiques, les pièces dépeignent des gens du Sud de la Péninsule parfois animés de cette “vitalité désespérée”, dont parle Pasolini.
    “Pour Lido Adriatico, je suis partie de l’idée que Dario, le personnage principal, était mort et revoyait dans un moment poétique en forme de flashback, les scènes défiler avant son assassinat avec l’apparition spectrale des êtres croisés, explique la metteure en scène. Seules demeurent les situations sans décor réaliste, contexte figuratif ni couleurs, tout en exagérant !expressivité du jeu des acteurs. C’est l’espace du deuil se déployant sur une plage au sable noir.”

    La scénographie voit le public prendre place autour d’une grande aire de jeu où se développent les épisodes du récit comme surgis de la mémoire. La pièce évoque une ado, qu’un jeune mafieux, Angelo, rêve de voir devenir playmate dans un concours régional avant de connaître un possible avenir de bimbo ou de prostituée. Magda (Isabel Tosic) se voit néanmoins d’abord étudiante en lettres. Significativement, elle se réfère à Triste et Vagabonde dû à un Baudelaire à l’existence fissurée, contradictoire et axée sur l’antinomie spleen/idéal, l’un ne pouvant exister sans l’autre. Le poète y répugne le monde qui l’entoure avec ce vers: “Loin des remords, des crimes et des douleurs.” Après avoir renié les grandes figures de l’histoire littéraire, elle décédera d’une overdose.

    Présent et passé se mêlent dans les flashs de l’esprit des protagonistes. Au gré d’Ave Maria, le même drame, l’assassinat par erreur d’une juvénile passante qui allait se marier, par un mafieux, est raconté par un scénario en puzzle. Le récit est donc conjugué avec une multiplicité des points de vue et voix, comprenant un choeur d’enfants invisible et la choralité du média radio finalement, fondus en un seul, impersonnel. Un peu à l’instar de Faulkner, l’un des modèles du dramaturge, pour des récits qui avancent par petites touches successives, c’est comme s’il construisait une vaste toile, dont seule la dernière maille nous permettrait de saisir si ce n’est le secret, du moins un sens.
    On est parfois proche de la veine du polar avec intrigues à plusieurs niveaux, et récits enchâssés. Ou du récit palimpseste et choral “à la manière de Kurosawa dans Rashomon, des versions différentes et contradictoires sont livrées autour d’un événement, d’une vérité par essence fluctuante, fragmentaire”, précise Carli.

    On dirait le Sud
    Au coeur d’une nuit bleu pétrole, un train attend à quai. Le décor représente par glissements de parois tout un champ de profondeur pouvant figurer le travail mémoriel ou un studio de cinéma.
    Ciao, Papa! voit Laura (Shin Iglesias) rencontrer fortuitement Riccardo (Roberto Molo), un acteur qui a, par le passé, incarné son père exécuté par la pègre locale. “Je suis parti de l’histoire authentique de Renata Fonte, députée qui s’est engagée pour entraver la spéculation immobilière sur les côtes de la Mer Ionienne, détaille Carli. Elle a été tuée devant chez elle en 1984 et le meurtrier n’a jamais été appréhendé”. La mise en abyme domine ici dans une structure faite de poupées russes, tant “chaque identité est plurielle”.

    Comme chez Faulkner, l’œuvre constitue une chronique des comportements humains dans leurs avatars les plus divers, extrêmes et violents: tantôt tragiques ou comiques.
    Il s’agit d’une série de plongées verticales, plus ou moins profondes, vers les racines de toute expérience. Délaissant le “réalisme” ainsi que la “morale” et la “psychologie” traditionnelles, le spectacle explore une voie qu’on peut dire anthropologique, en dessinant une sorte de chronique des comportements.

    Bertrand Tappolet

  • LE COURRIER le Mag - 22.11.14

    L’encre d’un franc tireur

    THEATRE Après ” Gomorra” monté à Genève par Philippe Lüscher en 2012, les “Chroniques Adriatiques” de Domenico Carli éclaireront bientôt au Grütli la réalité d’une Italie gangrénée par la mafia. Interview.

    Domenico Carli nous reçoit chaleureusement dans son atelier à Lausanne, une ancienne école de cinéma que ce fan de Scola, Risi ou Monicelli n’a sans doute pas choisie par hasard. C’est là qu’il y donne ses cours de théâtre, ou qu’ont eu lieu les répétitions de Lido Adriatico, dernier volet de ses Chroniques Adriatiques, récemment parues dans un même ouvrage. La trilogie sera bientôt jouée dans son intégralité au Grutli, à Genève, sous la houlette de la metteure en scène Anne-Cécile Moser, enthousiasmée dès 2012 par Ciao Papà, première des trois pièces (déjà traduite en italien, en anglais et en allemand) évoquant, sous l’angle des rapports familiaux, une terre minée par la mafia. Ce «Rital immigré», venu des Pouilles à l’âge de cinq ans, et qui n’a jamais opté pour le passeport suisse, se raconte avec franchise et humour. Une âme généreuse et humaniste, dont la plume déliée a merveilleusement saisi la réalité de son pays, plus que jamais gangréné par le crime organisé.

    Vos Chroniques Adriatiques, qui regroupent trois pièces fictionnelles autour du système mafieux, viennent de paraître (aux Editions d’En Bas). Vous êtes italien d’origine, né dans les Pouilles, le sujet vous est proche…
    Domenico Carli : Le théâtre offre la capacité de synthétiser la réalité en tant que métaphore. Ici en l’occurrence, l’Italie. Mais ce questionnement sur la mafia est plus général que simplement circonscrit à un pays. Le phénomène me préoccupe beaucoup, car il fait exploser pratiquement tous les rapports humains. La confiance et la solidarité, qui semblent aujourd’hui un peu ‘old-fashioned’, sont en train de s’effriter…

    Quelle analyse faites-vous du phénomène?
    Domenico Carli : Avec Nicolas Giannakopoulos, spécialiste du crime organisé, nous avions évoqué deux pistes lors d’un débat tenu après les représentations à La Chaux-de-Fonds, en 2012. Est-ce une crise de la démocratie qui amène à ce type de comportements? Ou une crise profonde de l’ultra- libéralisme? Les deux se rejoignent à un moment donné. Si c’est une crise de la démocratie, c’est très grave. Si c’est celle de l’ultralibéralisme, ça l’est encore plus! On a décrété que tout était en vente, que ce soit une mère, un fils, un rein, un bout de terrain, son identité – oui, la carte d’identité est un bien négociable.

    Aviez-vous en tête l’idée du triptyque lorsque vous avez commencé à écrire vos Chroniques Adriatiques?
    Domenico Carli : Non, au début il y a eu Ciao, Papà!, qu’Anne-Cécile Moser a créé au Pulloff à Lausanne, en 2012. Puis j’ai commencé à écrire Ave Maria, qu’elle a souhaité monter aussi. Il fallait ensuite conclure, d’où la commande de Lido Adriatico. Le sujet me hante. Est-ce que je l’ai vraiment bouclé d’ailleurs? Le crime organisé, c’est lourd à porter. Mes étagères sont pleines de livres… C’est une réalité qu’on essaie de camoufler, mais qui est en train de miner une génération entière. Et de manière un peu plus aiguë qu’avant, en raison de la conjonction de la crise économique et de celle des valeurs, et de la facilité à basculer dans la criminalité organisée, qui est presque valorisée par certains médias aujourd’hui. Cela donne un humus dans lequel on baigne tout le temps.

    Ciao, Papà! part d’un fait réel…
    Domenico Carli : Je me suis dit qu’il y avait quelque chose à faire autour du personnage de Renata Fonte (élue de la province de Lecce, assassinée dans les années 1980, ndlr), à qui est dédié Ciao, Papà!, et qui est à l’origine de cette fable sur le lien père-fille. Puis il y a eu le meurtre de Gelsomina Verde, jeune femme tuée par erreur, qui a inspiré Ave Maria, une suite de monologues adressés, qui questionnent les rapports mère-fille. Un peu comme une enquête qui avance à la suite d’un meurtre, donnant différents points de vue sur le même événement, à la manière de Kurosawa dans Rashomon. Je n’amène aucune solution mais s’il fallait dire quelque chose à ma génération, c’est ce que j’aurais envie de lui raconter.

    Ecrire, pour qui? Pourquoi?
    Domenico Carli : Pour les enfants, on s’attaque à des thématiques plus légères, mais toujours par la réflexion. A l’adulte, on lui en demande un peu plus. D’où le vœu pieux d’essayer de rendre la complexité de la chose, et d’éviter le manichéisme. C’est cela qui me passionne dans l’écriture. Comment rendre plausible et touchante une femme amoureuse qui se révèle être le lendemain une criminelle sans pitié, froide et calculatrice, comme dans Ave Maria?

    Quelles voies vous mènent à l’écriture?
    Domenico Carli : Par les enquêtes, les lectures et les rencontres, et mes fréquentations, je “pompe” un peu chez les autres. J’invente, je transforme. On m’avait par exemple raconté cette anecdote d’une jeune femme voilée travaillant en Suisse dans un centre d’accueil pour l’enfance, virée du jour au lendemain. Ça m’a inspiré Boléros. De manière générale, j’opère le travail habituel de l’auteur pour remodeler des personnages, avec des états d’âme, un point de vue sur la réalité, sans émaner d’idées conceptuelles ou de notions idéalistes. J’essaie au contraire de les rendre très sanguins, très charnels.

    Quand vous dites «enquête», qu’est-ce que cela recouvre exactement?
    Domenico Carli : Aller sur le terrain, rencontrer les gens. Au début des années 1990, avant la guerre au Kosovo, j’étais à Bari, dans les Pouilles. L’Albanie se libérait, les réfugiés arrivaient par la côte. A ce moment-là, je n’avais pas idée de la pièce que j’allais écrire, mais juste du phénomène. Zattera, lauréate d’un concours de la Loterie romande en 2006, signifie «radeau», et parle des boat-people. Le spectacle, que j’ai monté à Vidy, pose la question de la solidarité: un sentiment induit naturellement ou qui tient de l’acquis? Manifestement, certains l’acquièrent, d’autres pas…

    La même démarche vaut-elle pour l’écriture de vos Chroniques Adriatiques?
    Domenico Carli : J’étais à Naples, à Lecce, etc. Ce que la Mafia est en Sicile se dénomme «Sacra Corona Unita» chez nous, dans les Pouilles. Mais seul le nom change. Un de mes cousins est tombé dans la dope. Il venait nous taxer du fric. Ça commence comme ça… Ce cancer-là est l’une de leurs sources de revenus les plus importantes, le sujet du dernier livre de Roberto Saviano.

    Ecrire pour vous, est-ce une façon de résister?
    Domenico Carli : Il n’y a plus de place pour le cynisme aujourd’hui. Il faut proposer des parenthèses ou des bribes de solution, des actions. Le théâtre peut être le lieu de cet échange, de ces propositions. Raison pour laquelle nous allons bientôt jouer dans les classes (Le paquet, pièce écrite et mise en scène par Domenico Carli, ndlr). Je crois naïvement que le théâtre peut être vecteur de solutions!

    Dans la dernière pièce du triptyque, Lido Adriatico, la misère sociale est particulièrement criante. L’un des deux frères s’en sort en fuyant l’Italie pour l’Allemagne.
    Domenico Carli : La fuite des cerveaux est une hémorragie mortelle pour l’Italie. Nous assistons à une nouvelle émigration européenne. La preuve avec la nouvelle directrice du Cern, Fabiola Gianotti, une Italienne. On ne peut pas dire que la crise est dernière nous, comme le prétendent certains. J’ai lu récemment dans les journaux l’annonce de la démission de Riccardo Muti, pourtant chef honoraire à l’Opéra de Rome, où les conditions de travail devenaient épouvantables. Je suis très fan, il vient d’un village des Pouilles tout près de chez moi. A chaque fois que Muti prend sa baguette, c’est pour dire la même chose: ‘Mais regardez ce que vous faites! Vous êtes en train de démanteler la culture italienne!’ Si lui s’en va, que vont faire les autres?

    Le fil rouge entre les trois pièces des Chroniques est le lien familial, sur lequel vient se greffer une réalité sociale. C’est important pour vous?
    Domenico Carli : La famille, c’est notre culture. Et les liens qui se tissent en son sein aident à structurer la pièce. Quand on dit «mon père» ou «ma mère», on sait de qui l’on parle. La famille est qui plus est un lieu d’étude sublime. La preuve, c’est qu’elle est en train d’évoluer, comme on le voit en France. Le questionnement au père, qui sous-tend Ciao, Papà!, m’est venu dans des manifs dans le Sud de l’Italie, où flottaient de petits drapeaux à l’effigie du Che et de
    Bob Marley. A-t-on besoin de la caution d’un père idéologique ou spirituel et en quoi cette caution justifie-t-elle une action aujourd’hui? C’est vraiment dans les gènes. On n’a pas encore de manifs avec Simone Weil, Nina Simone… ou Annah Arendt!

    En 2012, à Genève, Philippe Luscher a réussi à porter à la scène Gomorra de Roberto Saviano, malgré des lettres de menace. La prise de risque est-elle réelle aussi de votre côté?
    Domenico Carli : La situation a été tendue pour Philippe Luscher, mais pas en ce qui me concerne. Il faut savoir que d’autres auteurs que Saviano vivent sous escorte en Italie. Dans ses ouvrages, qu’il vend dans le monde entier, Saviano divulgue les noms, les adresses et quasiment les montants en jeu dans le négoce illicite. Benigni disait aux mafieux: « Qu’est-ce qu’il a fait Saviano? Il a fait un livre.
    Vous n’avez qu’à faire la même chose! ».

    Vous n’êtes ni dans le réalisme, ni dans la dénonciation…
    Domenico Carli : Je ne suis pas dans le réalisme mais je l’éclaire. L’Italie est un pays formidable, généreux. C’est cela qui est émouvant. Les trois pièces des Chroniques se déroulent à Villafranca, une ville fictive. J’ai emprunté ce concept à William Faulkner. Lui comme tant d’autres écrivains inventent une géographie imaginaire dans laquelle se passent toutes ses histoires. Je viens d’un petit village des Pouilles qui s’appelle Margherita di Savoia. Quand un ami réussit à y monter une épicerie, des gars viennent lui dire: «Ton entreprise marche bien, on a décidé de te taxer 1000 euros par semaine. Comme ça marche de mieux en mieux, on va monter la mise à 1500 euros. Ce serait con si elle brûlait.» Ce sont de petits exemples, mais qui me touchent personnellement… Le nombre d’entrepreneurs suicidés est une calamité. Les banques ne font pas leur boulot. Difficile, inutile et idiot alors de parler de mes petits problèmes de quadragénaire… D’autres le feraient mieux que moi. Mais il y a de la place pour tout le monde, disait Grotowski. Notre travail au théâtre est de susciter la réflexion.

    Cécile Dalla Torre

Presse audio

  1. Radio Fribourg - 24.05.2008 http://acmosercie.com/wp-content/uploads/2016/06/boite.mp3
  2. Rts la Première - 25.05.2008 http://acmosercie.com/wp-content/uploads/2016/06/boite.mp3
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